Dans le premier album de Lambchop, sorti en 1994, se trouve une chanson qui s’intitule Cowboy on the Moon. A elle seule, cette ballade doucement surréaliste pourrait condenser le propos et le parcours de la troupe de Kurt Wagner : voilà des Américains profonds et légers, à la fois enracinés dans leurs terroirs musicaux (country, rock, folk, soul…) et tendus vers les horizons sans limites de l’imaginaire. Son plus grand acte de cow-boy lunaire, Wagner l’a accompli en créant à Nashville, capitale de la country orthodoxe, ce collectif à géométrie variable fâché avec les étiquettes et les dogmes. Nulle posture iconoclaste ni rebelle dans cette aventure amicale et musicale, mais une invitation permanente à l’échappée belle, animée par cette conviction intime : c’est par les biais sinueux de la rêverie qu’on accède au cœur palpitant du réel et de l’humain. Ces chemins dérobés, Lambchop, sur scène, les emprunte aujourd’hui avec un sens aigu du geste juste et de l’épure : le silence est son allié naturel, un contrepoint et peut-être un antidote à la subtile gravité qui étreint ses chansons – notamment celle de “Mr. M” (2012), album dédié à la mémoire de l’ami disparu Vic Chesnutt. Il faut entendre la voix de Kurt Wagner, ce crooner sensible qui semble aspirer à l’invisibilité, se fondre avec sa guitare et les instruments complices de ses partenaires, dans un souffle ténu et intense, à la lisière du murmure… Un concert de Lambchop est une incomparable expérience d’écoute. Mieux : pour paraphraser le poète Friedrich Hölderlin, c’est un moyen sûr “d’habiter poétiquement le monde”.
BIOGRAPHIE
Fondé par le peintre Kurt Wagner, qui restera plusieurs années charpentier de métier, Lambchop a incarné au début des années 90 la nouvelle vague du rock indépendant américain, aux côtés de Will Oldham (Palace), Bill Callahan (Smog), Mark Linkous (Sparklehorse) ou encore Vic Chesnutt. Luxuriants (l’orchestré “How I Quit Smoking”, 1996, le cuivré et soul “Nixon”, 1998), ou réduits à l’essentiel (“Is a Woman”, 2002), génialement bricolés (l’inaugural “Jack’s Tulips”, 1994) ou savamment ouvragés (“Damaged”, 2006), ses albums dessinent une œuvre riche et éclectique. Kurt Wagner a également collaboré avec Morcheeba, Josh Rouse et Cortney Tidwell, et écrit pour l’Anglais Tim Burgess.
DISTRIBUTION
Kurt Wagner, Tony Crow, Alex McManus, Scott Martin, Ryan Norris, Matt Swanson, William Tyler