Rien d’étonnant finalement à ce que Jean-Michel Frère s’empare de l’univers décapant de ce blaireau de Francis entouré de ses cochons, souris, rat, renards et loups. À la manière d’un La Fontaine, mais avec la cruauté d’un Reiser ou d’un Desproges, cette bande-dessinée passe au crible le chômage, l’écologie, le capitalisme, la société de consommation, l’humanitaire, les dictatures, la surpopulation, le sida, etc., égratignant le politiquement correct, la bien-pensance et toutes les idées reçues politico-économico-sociales. « Francis est faible, lâche, cynique, cruel, égocentré, expliquent Pauline Desmarets, François Saussus et Sébastien Derock. Il peut abandonner toute morale, toute éthique, toute fidélité, toute culpabilité, du moment qu’il peut satisfaire ses besoins essentiels : boire-baiser-bouffer. »
Adaptant une trentaine des aventures et péripéties tirées des strips de six cases commençant toutes par « Francis se promène dans la campagne », la pièce pervertit les codes du théâtre d’objet, dans un esprit très Hara Kiri et Charlie Hebdo, en embarquant le spectateur pour 40 minutes d’humour noir, décapant et sans concession. Une mise en scène sobre et au cordeau, pleine d’idées et de trouvailles, où ça grince, dégrippe et dérape, dans un décor de chambre d’enfant aménagé en théâtre de marionnettes trash.
Tout le monde en prend pour son grade, dans le petit royaume de l’absurde de Francis sauve le monde. Dans un grand rire cruel et salvateur.
BIOGRAPHIE
Depuis 1993, la Compagnie Victor B et Jean-Michel Frère explorent les frottements entre le théâtre et les langages artistiques contemporains (vidéo, installations plastiques, installations sonores, breakdance, etc.), avec un sens certain du détournement et un humour impitoyable. Après ses premières créations SC. 35c (2000), Men Need Sleep (2003), Plus vite que tes yeux (2005), Je suis libre ! hurle le ver luisant (2009), les spectacles vont interroger de nouveaux rapports entre acteurs et public et privilégier un théâtre de proximité et de l’intimité. Trois secondes et demie (2000), Une petite Allergie (2013), Poney pour toujours et Une veillée électro (2013) affinent le propos tout en continuant à s’adresser au plus grand nombre pour rassembler des publics a priori très différents, dans l’espace public. Après les créations de Kermesse (2008), Trop de Guy Béart tue Guy Béart (2012) et Walking Thérapie (2017), les Tombées de la Nuit poursuivent cette longue complicité en accueillant le déjanté et corrosif Francis Sauve Le Monde.
DISTRIBUTION
Adaptation : Pauline Desmarets, Simon Wauters, Sébastien Derock et Jean-Michel Frère. Interprétation : Pauline Desmarets, Simon Wauters et Sébastien Derock.
Mise en scène : Jean-Michel Frère.
Scénographie, objets et costumes : Coline Vergez.
Création Lumières : Julien soumillon avec l’aide de Johan Flamey et de Luca Derom.
D’après la BD « Francis » de Claire Bouilhac et Jake Raynal (Editions Cornélius).
Une production Compagnie Victor B et Théâtre de Namur